7 mai 2015

BOURCIER Jean-Baptiste Georges

Jean Baptiste Georges BOURCIER est né le 1er septembre 1871 à Poitiers, au 43 rue des Trois Piliers (l’actuelle rue Carnot). Lors de ses classes militaires en 1891, il est forgeron dans la ville de Marseille. Il revint provisoirement dans la Vienne pour épouser Berthe Angéline MANGUET à Châtellerault en 1908. Il est alors charpentier.


Le journal de marche de son régiment précise que le 5 mai, une fausse alerte est occasionnée par le sergent Bourcier qui en profite alors pour quitter son poste. De ce fait, il est traduit devant le conseil de guerre.


Le compte-rendu de son jugement est incroyable. Aucun témoin n’est appelé à témoigner. Un caporal est chargé de sa défense. Cinq questions courtes sont posées au sergent, et apparemment, il ne comprend pas ce qu’il lui arrive puisqu’il répond à chaque fois par la positive, ce qui correspond alors à des aveux. Son avocat commis d’office précise même que « l’accusé a peut-être la tête un peu dérangée et que sa mentalité peut être suspectée ».



Son dossier de justice militaire contient les lettres que le sergent Bourcier a envoyé à sa sœur et à sa femme  : 


"Ma chère sœur, je vais un peu te surprendre par la courteté du billet que je t'écris, je te préviens, arme toi de courage c'est une dure épreuve à passer mais est au moins assez courageuse pour la supporter et de porter l'autre enveloppe à ma Berthe chérie contenant mes petites économies que lui renvoie la somme de 95 francs que je n'aurais bientôt plus besoin et peut que lorsque tu la recevras, j'aurais cesser d'être. La guerre est triste quand on croit bien faire pour l’intérêt de tous, on est pas brave, on est lâche et voila de quoi l'on m'accuse car je suis accusé, mais ne crois pas que je mourrais en lâche,  si je dois en mourir, non jamais. Je me mettrais du  cœur au ventre et je prouverai à tous ceux qui m'accusent de lâches qu'il font erreur, que je suis brave et sans peur et de ça d'autres s'en glorifieront au lieu d'être accusés..."

La lettre à son épouse est passée par la censure qui a fait son office :


Malheureusement, le sergent BOURCIER n'aura pas le temps de prouver son innocence, il sera exécuté le lendemain, 7 mai, après un procès éclair, un jugement expéditif sans enquête et une sentence immédiate !

Un témoin, un certain Philippe Langier, soldat du même régiment affirme avoir entendu le colonel BOUSSAT (qui commandait alors le groupe des Bataillons de Chasseurs de la 66éme Division) dire : « je veux que ce soldat soit fusillé demain matin ».


Un autre témoin précise que le 5 mai 1915, lui aussi avait bien entendu des coups de feu, et qu’à son réveil, il cherchait le sergent Bourcier, mais que celui-ci était parti cherchait le Lieutenant pour l’informer de cette fusillade. Ledit lieutenant n’était pas dans les tranchées car avec l’humidité et le froid, il avait préféré « dormir au chaud ». Ce témoignage confirme que la soi-disante fausse alerte ne l’était peut-être pas.

En tout cas, il n’a fallu que deux jours pour que le soldat BOURCIER soit accusé, jugé et fusillé.

Dès 1921, la veuve BOURCIER fait des démarches, notamment via un député des Alpes Maritimes, pour avoir accès au dossier de son mari et demander une révision du procès. Cette demande de révision sera une première fois rejetée le 6 juillet 1922 par le parquet général d’Aix-en-Provence.
La veuve Bourcier, revenue sur Châtellerault pendant la guerre, devra attendre le 8 décembre 1934 pour que la cour spéciale de justice militaire reconnaisse la révision de la condamnation prononcée contre le sergent BOURCIER et « prononce la réhabilitation de sa mémoire ». La révision a été possible grâce à des suppléments d’informations, notamment deux énormes irrégularités qui constituent un cas de nullité absolue : 
  •             En premier lieu, le rédacteur de cette note indique que « le conseil de guerre n’a pas statué séparément d’abord sur le fait principal d’abandon de poste, ensuite sur la circonstance aggravante de la présence de l’ennemi ». 
  •            En second lieu, « le jugement n’a pas énoncé par quel nombre de voix la peine a été prononcée ».

Même si cette révision du soldat BOURCIER ne  statue pas principalement sur les faits mais sur des vices de procédures, la demande de révision s’appuie aussi sur de nombreuses constations et témoignages qui prouvent que le sergent Bourcier n’est pas coupable.



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